Anecdotes & Réfléxions

Pourquoi je n’aime plus vivre à Paris

D’un point de vue technique, je n’habite pas à Paris. J’habite à Vincennes, à environ 2km en dehors du périphérique parisien. Et j’aime Vincennes. C’est une ville agréable à vivre, avec un vrai centre ville où faire ses courses, un château et le Bois de Vincennes pas très loin de chez moi. Vincennes est une ville lumineuse. Vivre à Vincennes, c’est un peu vivre loin de Paris sans ses inconvénients mais avec beaucoup d’avantages.

Mais malgré tout, la proximité de Paris se fait ressentir. Ce n’est qu’à 15 minutes à pied après tout. J’ai beau aimer Vincennes, je n’aime en revanche plus habiter la région parisienne.

Je vis à Paris et en proche banlieue depuis mes 19 ans. J’ai fait deux coupures durant lesquelles je suis partie en Irlande et à Caen pour mes études. Quasiment 2 ans de beaux souvenirs.

J’ai emménagé près de Paris à 19 ans car j’avais été reçue à la Sorbonne pour mes études. Je ne rêvais pas particulièrement de Paris. Je rêvais simplement à plus d’indépendance. Je voulais essayer de vivre comme les jeunes de mon âge. 

J’ai fui Paris à 21 et 23 ans. Je n’aimais pas Paris. J’y vivais parce-que c’était pratique, parce-que je devais y étudier. Venant des Yvelines, étudier en région parisienne représentait pour moi une facilité et je n’ai jamais pensé du haut de mes 18 ans à peine que je pouvais étudier ailleurs en France (ou dans le monde). L’idée m’est venue plus tard. Paris était déjà assez loin même alors que je rêvais déjà d’ailleurs à l’époque.

Malgré mes deux tentatives de fuite, je suis toujours revenue à Paris. Par facilité et praticité surtout. Et aujourd’hui à bientôt 31 ans, je désire encore une fois la quitter, pour je l’espère, ne jamais revenir.

Vivre à Paris a été pendant de nombreuses années une nécessité. Pour le travail, pour les amis. J’en ai bien sûr profité et je l’ai même aimée à certaines périodes de ma vie. Mon travail en lui-même portait sur l’exploration de Paris donc j’ai dû en apprendre plus sur elle et l’apprivoiser. J’ai surtout découvert son histoire, ses monuments, ses lieux cachés incroyables et ses secrets qui font habituellement tout son charme. Je me suis servie de ces connaissances apprises sur le tas pour vendre des voyages à Paris à des étrangers. Je devais l’aimer pour mieux la vendre. Et je l’ai vraiment aimée pendant un moment.

C’est vrai que Paris fait rêver. Sa culture, son histoire, sa grandeur. Ce sont des aspects que j’adore à propos de Paris et je dois avouer que ses musées et sa beauté me manqueront une fois partie. On trouve de tout, tout le temps, partout.

Mais c’est bien tout ce qui me manquera. 

A Paris, je ne me sens pas en sécurité. Je ne me suis jamais sentie en sécurité. Tout ça parce-que j’y ai vécu en tant que jeune femme. J’ai arrêté de compter les fois où l’on (quand je dis on, je fais bien sûr référence à tous les gros bonshommes relous qui arpentent les rues) m’a abordée, sifflée, suivie, insultée, touchée sans avoir rien demandé. J’ai longtemps eu peur de rentrer chez moi seule le soir. De porter des robes courtes avec collant, des décolletés, des talons. Je n’aimais pas les regards que l’on me porte parfois, qui m’ont fait me sentir comme un bout de viande. 

Au fil du temps, ça allait mieux, j’ai appris à me défendre et surtout à ignorer. Je ne sors désormais jamais sans faire la tête dans la rue et sans mon casque audio. Mon casque est devenu ma première défense. Je peux ainsi plus facilement ignorer les gens quand ils me parlent. Sans mon casque audio sur les oreilles, je me sens nue quand je sors. Alors je ne sors jamais sans. Mon casque me sert aussi à filtrer mon environnement : le bruit des voitures, des passants. C’est mon bouclier.

C’est entre autres à cause de ce genre de comportement que les Parisiens et les Parisiennes sont perçus comme des gens froids. C’est vrai. Mais c’est un moyen de défense contre toutes les agressions quotidiennes que l’on subit dans les transports, dans la rue, sur la route. 

C’est l’une des raisons pour lesquelles je n’aime pas vivre à Paris : je veux pouvoir sortir de chez moi et être tranquille. Je veux cesser d’être tout le temps en colère quand je sors et d’anticiper la moindre perturbation qui déclencherait cette colère. Que ce soit une remarque, un regard, un bruit trop fort, une incivilité, une odeur désagréable etc.

L’insécurité est pour moi l’un des défauts principaux de Paris. Quand j’habitais en Irlande, jamais je ne me suis sentie en danger, peu importe l’endroit où je me trouvais, l’heure qu’il était ou dans quel état j’étais. Jamais. Montréal m’a donné la même impression lors de mes trois passages là-bas. C’est pour ça que je veux que ce “là-bas” devienne mon “ici”.

Je n’aime plus vivre à Paris car je dois sans cesse surveiller mes affaires. C’est du bon sens me diriez-vous. Mais c’est épuisant à force. A l’époque, je portais des tote bags en guise de sacs à main. Forcément, je me suis fait voler mon téléphone portable à même mon tote bag un jour. C’était sur le quai du métro, en pleine heure de pointe. J’ai porté plainte (dans le vent), et j’ai acheté un petit sac à main fermé. Plus jamais je n’ai utilisé de tote bag pour ranger mes affaires personnelles. Les pickpockets et les arnaques en général à Paris sont épuisants.

Paris, c’est aussi la foule, le bruit, l’agitation, sans cesse. C’est une ville surpeuplée, toujours en effervescence. Les voitures klaxonnent, les gens se croient parfois tout seuls (je pense notamment à mes voisins qui manient la perceuse à tout va, parfois tard le soir), les gens sont malpolis et ont du mal avec l’espace personnel (sentiment exacerbé grâce à notre ami le Covid), les incivilités omniprésentes. La misère l’est aussi, et je ne peux pas y faire grand chose malheureusement. C’est d’une tristesse affligeante.

C’est ça en fait le mot d’ordre: l’épuisement. Paris m’a épuisée. Au fil du temps, elle a mangé des petits bouts de moi, de ma personnalité et de mon bien-être sans me donner autant en échange. Alors j’ai beau aimer les musées parisiens, aller boire des coups en terrasse avec les copains (enfin ça, c’était avant) et vendre des séjours de rêve à Paris à des touristes, je pars quand même, pour mon propre bien. 

La vie est chère, les espaces verts sont rares (et pourtant j’ai de la chance d’avoir le Bois de Vincennes à portée de main), tout est étriqué. J’ai l’impression qu’on est tous entassés les uns sur les autres. Paris m’étouffe. J’ai besoin de plus d’espace.

Je ne veux plus être en colère. Je ne veux plus avoir l’air méchant quand je marche dans la rue, je ne veux plus devoir m’accrocher à mon sac quand je m’assois dans le métro, je ne veux plus ne plus m’émerveiller face à une ville aussi belle et fantastique. 

Je veux m’émerveiller de nouveau, je veux me libérer de ma colère. Alors je pars. Bientôt. Montréal n’est sans doute pas parfaite mais elle m’inspire, elle m’attire et les peu de fois où j’y suis allée, elle m’a apaisée. Je n’y resterais peut-être pas toute ma vie, mais je suis sûre d’une chose : je ne reviendrai jamais vivre à Paris.

2 commentaires

  1. Stanislas a dit :

    J’ai le même sentiment sur Paris…On dit souvent qu’on l’aime et qu’on la déteste en même temps . Mais les relations passionnelles sont épuisantes. Passer un certain âge je préfère une relation tranquille et mature. Je me suis pris deux coups dans la figure Place de la Concorde récemment…faut le faire quand même !

    1. Elisabeth a dit :

      Tout à fait, c’est très bien et très joliment dit ! D’où le besoin d’évasion fréquent 😄
      Mince pour la Concorde ! J’espère que ça va à l’heure actuelle 😣

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