Il était une fois le Covid
Le mois de mars 2021 a marqué l’anniversaire de mes 12 mois en chômage partiel. Et comme j’essaye de faire attention à ce que je mange (et qu’il n’y a pas de raison de faire la fête non plus), le gâteau sera pour une prochaine fois.
Pour marquer cette année passée, j’avais envie de faire un bilan de mon « expérience » en tant que professionnelle du tourisme venant de passer 1 an en chômage partiel.
En mars 2020, quand on nous a annoncé le premier confinement, j’étais loin de m’imaginer que la crise sanitaire durerait plus d’un an. Personne ne le croyait finalement. Comme tout le monde, je me disais que c’était juste une petite grippe et que les autorités ne mettraient jamais une ville comme Paris (encore moins la France et le monde entier) en quarantaine. C’était bien naïf mais au final, je ne faisais que répéter ce que tout le monde autour de moi pensait.
Le confinement tombait plutôt bien pour mon entreprise car on devait déménager nos locaux à cette période. Et comme on n’avait pas encore signé le nouveau bail, ça ferait une économie. On bouclerait les derniers dossiers et annulations depuis chez nous. Car oui, ne travaillant qu’avec une clientèle américaine, une cascade d’annulations s’en est suivie dans les semaines à venir. Ç’aurait été pareil avec une clientèle française remarque.
Quand le doute arrive au galop
Je dois avouer qu’au début, j’étais mi-inquiète, mi-contente. Mi-inquiète car les indemnités du chômage partiel me faisaient perdre quasiment 300€ sur mon salaire et qu’on ne savait pas combien de temps ça durerait. Mi-contente car j’aurai du temps pour moi pour quelques semaines. Sauf qu’un an après, du temps pour moi, j’en ai eu assez.
M’adapter à mon nouveau « salaire » a été compliqué mais comme tout était fermé, les dépenses étaient inévitablement limitées. Je me suis tout de même sentie chanceuse dans le sens où je pouvais (et peux encore) bénéficier d’une aide financière le temps que mon entreprise se remette sur pied.
Au début, j’étais comme tout le monde – à la maison et/ou en chômage partiel -, j’ai essayé d’en profiter à fond dans la limite des quatre murs de mon appartement. Quand les choses ont recommencé à se remettre en route en mai 2020, c’est là que j’ai commencé à avoir des baisses de moral jusqu’à culpabiliser. Je faisais partie en effet des personnes qui n’avaient pas repris le travail et il m’était difficile de me dire que je n’étais pas en mesure de reprendre. Je n’avais de cesse de me dire que ce n’était pas ma faute, que tout resterait bloqué tant que notre clientèle américaine ne pourrait pas revenir, que ci, que ça. Et pourtant la culpabilité s’était installée. La culpabilité de rester encore à la maison quand beaucoup de monde pouvait retourner au travail. La culpabilité de toucher des aides de l’État sans rien apporter en retour (pour moi les impôts que je continuais de payer au même taux ne comptaient pas vraiment). La culpabilité de ne pas savoir quand je pourrais retravailler et me « rendre utile ».
Aujourd’hui, un an après, je me suis faite à l’idée. J’essaye toujours de chasser cette culpabilité qui est bien moins oppressante qu’avant. Je me répète que je ne suis pas une bonne à rien car je ne travaille pas en ce moment. Finalement, je me mets la pression toute seule car personne ne m’a jamais dit que je ne valais rien en étant en chômage partiel.
Au-delà de la culpabilité, c’est aussi l’ennui qui a envahi mon quotidien. Parfois avec virulence, parfois pas du tout. Tous les jours, il faut trouver à s’occuper, de façon productive de préférence, histoire de ne pas légumer sur le canapé. J’ai eu pas mal d’idées de projets et d’idées d’activités. Beaucoup n’ont pas abouti et ne sont pas encore arrivées à terme mais je me sens moins coupable à force d’occuper mes journées. Mais l’ennui est un luxe de nos jours donc j’évite de me plaindre et je profite du temps qui m’est accordé au mieux.
Au final…
Je suis sans doute toutefois bien lotie comparé à d’autres personnes qui doivent vivre cette situation bien moins facilement. Rien que côté indemnités. Le tourisme étant un secteur d’activités protégé, nos indemnités sont parmi les plus avantageuses. Je relativise tous les jours : j’arrive à vivre avec les aides que je touche (je ne dépense plus de toute façon), je n’habite pas seule et rien que ça joue beaucoup sur le moral, j’arrive à me projeter un peu, j’ai essayé de préserver les liens sociaux au maximum bien que parfois au ralenti.
J’arrive à continuer de faire des choses, des activités et déjà ça, c’est une victoire (j’ai créé ce blog alors que je ne pensais pas que j’irai au bout). Mais surtout, aucun de mes proches n’a déclaré forfait face au Covid. J’ai encore une liste longue comme le bras de choses que je veux faire dès que les restrictions seront levées. Je veux retourner au musée, à la piscine, en vacances, au restaurant en face de chez moi, en concert et j’en passe. D’une certaine manière, c’est aussi compliqué d’avoir une éternité de temps libre devant soi et de ne pas pouvoir en faire ce qu’on veut. Heureusement que j’ai une vue sympa depuis mon salon.
Le Covid n’aura été une bonne surprise pour personne, ce n’est pas un scoop. Mais le temps qui m’a été donné, même si limité en possibles, est une chance. Une chance de réfléchir, de souffler, de (re)découvrir, de cuisiner, de lire, d’écrire, d’inventer, d’imaginer. La crise sanitaire aura été une pause, une période d’hibernation. Je n’ai qu’une hâte à présent, celle de me réveiller.